En noir et blanc, des métiers racontés par leurs ouvriers.
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Le vannier, le hottier, le jouguier, le galochier, le sellier-bourrelier, les perleuses, le dinandier, le saigneur, les potiers de terre, les charrons.

Photos d'autrefois en noir et blanc


Des métiers racontés par leurs ouvriers.


Les charrons d'Auvergne et du Bourbonnais.

La reconversion des charrons.


La génération des charrons comme Roger Méténier a été brisée en pleine jeunesse. Qu'on en juge par ces deux dates.

- En 1950, à l'âge de 27 ans et en pleine possession de son métier, il s'installe à son compte à Jenzat. Il a acheté une ruine qu'il restaure lui-même pour en faire son atelier et sa maison. Il a acquis l'outillage de charrons retraités.

- En 1952, le travail de charronnage s'est arrêté net. Commence alors pour l'artisan une longue course après « le progrès » technologique. « Ça a été terminé en 1952. C'est venu le pneumatique et puis le charronnage moderne, le charronnage mécanique, la remorque agraire. Alors on s'est mis à la construction de remorques agraires. Et puis, on a été obligé d'abandonner, parce qu'il y a des fabriques qui ont sorti ça en série. On n'était plus compétitif, ni pour les délais, ni pour les prix ».

- Ceci jusque dans les années 1960 environ. Roger Méténier se met alors à fabriquer des carrosseries de camions poids lourds. Il a abandonné totalement le bois. Ce sont des profilés et des tôles que l'artisan travaille désormais,

- « On a fait des camions pour les transporteurs-déménageurs. Et puis on a travaillé pour la minoterie à côté. On a fait les plateaux pour ramasser les sacs de grain et puis des fourgons pour ramasser les sacs de farine ».

- L'affaire marche bien jusqu'en 1975, mais le même processus se reproduit, « Il s' est passé que pour une petite entreprise artisanale comme on était, on avait des délais de livraison qui étaient trop longs. Alors, à ce moment-là, le matériel augmentant, les patrons des camions qui faisaient des emprunts pour acheter, ne tenaient pas à ce qu'un camion reste 4-5 mois sans travailler. Alors, il y a de grosses maisons qui se sont spécialisées et qui ont fait des caisses ou des carrosseries d'avance où, alors, on livrait tout d'avance sous une huitaine. C'est tout, c'est l'évolution et puis on continue de la subir sur bien des points ».

- Cette phrase, lourde de résignation, contraste avec le visage encore jeune malgré les rides, le regard bleu où on lit une sorte de confiance malgré tout, l'accent bourbonnais imprégné de bon sens terrien. La vitesse de l'évolution technologique est en soi un problème. Mais il y a un véritable drame de l'artisan face à l'industrie, une sorte de combat inégal.

- Dans sa jeunesse vers 1912, Paul Coulomb de Sayat a appris la menuiserie en voitures. La voiture est entièrement réalisée en bois et tôlée par dessus. Avec des cours par correspondance, il doit apprendre le dessin pour débillarder le bois et ce n'était pas facile, précise-t-il. Et enfin il se rend au Havre où son frère avait fondé une des premières entreprises qui ait employé la peinture au pistolet. Charron, menuisier en voitures, peintre en carrosserie, on reste pantois devant une telle accumulation de savoirs. Le recyclage n'est pas une invention d'aujourd'hui.

- Mais tout le monde n'a pas su ou pu prendre « le virage » du progrès avec autant de détermination et de talent. Il y avait encore dans l'entre deux-guerres une belle place pour les charrons. Antonin Boissy s'est installé à son compte à Volvic en 1927, à l'âge de 22 ans. Il laisse les lourds fardiers à pierre à ses collègues, car il n'a pas de commis, c'est sa femme qui lui donne la main. Il se spécialise dans le véhicule agricole, tombereaux, chars, charrettes, tonnes à eau, à sulfater ou à purin.

- « Aux environs de 1950, tout a basculé. C'est-dire le pneu d'un côté, le tracteur de l'autre... Il y a beaucoup de mon âge qui sont partis à l'usine, aux entretiens, qui ont changé de métier. Moi, comme j'avais promis à mon père, j'ai tenu bon et modifié mon métier. Pendant la guerre, j'en ai appris... J'étais avec tous les armuriers de Saint-Etienne, les couteliers de Thiers, tous les fabricants de Saint-Chamond, ou Chambon-Feugerolles... Alors à ce moment là vers 1950, les forgerons ayant décliné par ici, j'ai pris la forge. J'ai pris de très bons entrepreneurs qui m'ont fait travailler, entre autres la maison Chambon.

Vous faisiez quoi?

- On forgeait les outils, les haches, les burins, les arrache-clous, les pointerolles, les piques pour compresseur. J'ai travaillé longtemps pour eux. Et je n'ai jamais eu de reproches ».

- A. Trunel qui était un petit industriel de roues en blanc, mais très précocement mécanisé, a lui aussi dû se reconvertir. Il a fallu faire feu de tout bois, des abattants de W.C. ruinés dès 1955 par le plastique, des montants de diables, réalisés ensuite en tubes métalliques, de la boissellerie diverse jeannettes, tables à repasser, carabines jouets. Cette simple énumération montre le génie inventif de cet atelier ambertois mais aussi la précarité de ces reconversions.

- Par ces 4 exemples pris en Bourbonnais et en Basse-Auvergne, nous n'avons pas la prétention d'avoir fait « le tour » de la question. Ces destins sont pourtant comparables.

- La roue en bois est un objet qui atteint la perfection technologique. Le pneumatique qui présentait beaucoup d'avantages, l'a supplanté. Mais, objet manufacturé, sa production a échappé aux artisans.

- Ceux-ci, habiles à tout faire, ont essayé avec succès parfois, de poursuivre dans des branches très diverses, menuiserie, charpente, boissellerie pour ceux qui sont restés dans le bois, carrosserie, charpente métallique, forge, serrurerie pour ceux qui ont choisi le fer.


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