En noir et blanc, des métiers racontés par leurs ouvriers.
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Photos d'autrefois en noir et blanc


Des métiers racontés par leurs ouvriers.


Le saigneur de Moissat-Bas.

Histoire(s) de tuer... le temps et les cochons.


Félix est intarissable sur son métier, en particulier sur les façons différentes de découper la bête. Nous avons vu précédemment que notre tueur « lève » ses cochons en les fendant de chaque côté de l'épine dorsale. Cette manière convient mieux d'après lui aux usage de la campagne et aux bêtes qui sont ses « victimes » habituelles. « En principe, c’est 120, 130(kilos et plus... C'est des bêtes plus grosses et plus grasses, plus chargées en graisse. Et moi, je crois que le système que je fais sépare bien le lard du maigre. Les gens, pour faire les salaisons, le saucisson, même, pour congeler c'est valable ».

- Les cochons charcutiers, destinés à la clientèle urbaine, font moins de 100 kilos, sont beaucoup moins lardeux. Les charcutiers ouvrent le ventre et les côtes sont coupées de l'intérieur, au milieu de la colonne vertébrale. Les côtelettes vendues par eux ont donc toujours un morceau de filet et une épine dorsale, ce qui est plus avantageux pour la vente.

- Au cours de sa captivité, Félix a pu observer la manière allemande de « lever » les porcs. Ceux-ci n'étaient découpés que froids, car un contrôle sanitaire était effectué entre la tuer et le dépeçage. Ils étaient fendus sur le ventre, les entrailles enlevées. Puis, avec un couteau et un maillet, le tueur allemand découpait la bête de l'intérieur et de chaque côté dé l'épine. Chaque moitié de porc ainsi séparée de l'autre, on enlevait les jambons, on débitait les côtelettes de la même façon que chez nous.

- S'il y a la manière « allemande » il y a aussi la façon « portugaise ». Et Félix n'est pas tendre à l'égard de cette nationalité, « Les plus qui esquintent les cochons, c'est les Portugais. Ah! Il les assassinent. Les caraï se ramènent avec un grand couteau, une lame comme ça, et dans le cou, vas-y que je t'enfonce ! Mais il ne sort pas de sang (..). Puis alors, ils les étouffent, ils leur ferment le nez, faut pas qu'ils crient! Ils leur ferment le nez avec une ficelle. Ils bouchent les trous. Il ne peut gueuler ni par la bouche, ni par le nez, ni renifler... Il est foutu! ».

- Ne voyons nul racisme dans cette citation, ce serait mal connaître la Limagne où les Portugais se sont implantés en grand nombre. Ils ont fait apprécier leur courage au travail et se sont bien intégrés aux populations rurales. Félix fait simplement un constat objectif d'homme de métier. Il juge ces apprentis tueurs sur leur incapacité à saigner une bête correctement. Soit elle meurt par hémorragie interne, soit elle « sulfate » le sang, au lieu de le faire s'écouler.

- Mais il n'y a pas que des histoires « d'assassinats » dans les veillées de Félix. Il y a aussi les anecdotes savoureuses comme celle des « rognons du cochon à Fougère ». Mais laissons la parole au conteur, « Une fois, j'en ai tué un chez Fougère. On était en train de le dépecer, Il me donne un assiette... il met les deux rognons dessus, lui, il tourne le dos. Je dis, « faudra faire gaffe au chien! Oh t'en fais pas, il veut pas les prendre... ». Je n'avais pas fini de dire, moi je tournais le dos, hop! l'autre, le chien il prend un rognon et pffuitt ! Il s'en va.

- Il y avait de la neige, je me rappelle. Il court, Fougère, il court Bon Dieu! Mais l'autre le lâchait pas (..) Il avait ce rognon qui dépassait de sa bouche. A peine. Il l'avait pris comme ça... un peu timidement bien sûr. Il l'avait chopé avec la pointe des dents. Il partait avec ce rognon, bien beau, bien tout, qui pendait... Il s'en allait avec, en direction de chez lui, ce chien (..).

- Mais Fougère, derrière, qui faisait claquer ses sabots, Bon Dieu! et qui gueulait... Il pensait lui le faire lâcher. Quand il a été peut-être à 2 ou 3 mètres du chien, le chien a fait ça, Tac! Il donne un coup de tête, comme ça, il jette le rognon en l'air, clac! Il le reprend à pleine gueule, hop-là! Et alors après, mon vieux, il passe une vitesse, et toi, Fougère, cours derrière avec tes sabots... ».

- Souhaitons à Félix d'avoir encore beaucoup de cochons à tuer et de conter ses histoires avec toute la verve digne d'un saigneur de village.


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